Radio-Canada se fie à une organisation liée à la CIA pour traquer les fausses nouvelles

Dans son émission Ceci n’est pas un faux reportage, Radio-Canada nous parle du Digital Forensic Research Laboratory, ou DFRLab :

« Pour les aider dans leur bataille contre la désinformation, le Canada et d’autres pays de l’OTAN s’appuient sur le travail de divers organismes. Le DFRLab, une sorte de laboratoire de recherche numérique avancé, est un de ceux-là. »

Qui dirige ce laboratoire? Qui le finance? Ce sont-là des questions cruciales que ne se sont vraisemblablement pas posé les journalistes d’Enquête.

Donara Barojan du DFRLab explique :

« On surveille divers réseaux sociaux et médias sur internet pour identifier toute désinformation potentielle et on essaie de réagir aussi vite qu’on peut pour s’assurer que leur impact soit le moins significatif possible. »

Cette affirmation est complètement risible lorsqu’on sait que le DFRLab est un programme de l’Atlantic Council, une organisation comptant parmi ses administrateurs nul autre que le tristement célèbre criminel de guerre Henry Kissinger, qui nous a donné, entre autres, le coup d’État de Pinochet au Chili, ainsi que la figure exemplaire de la désinformation des temps modernes, Colin Powell, l’homme au légendaire discours frauduleux à l’ONU sur les armes de destruction massive en Irak.

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Henry Kissinger et Augusto Pinochet.
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Colin Powell faisant sa propagande sur les armes de destruction massive à l’ONU.

Mme Barojan accuse Global Research, un site qui critique haut et fort la politique étrangère interventionniste des États-Unis, du Canada et de l’OTAN, de faire de la propagande pro-Kremlin, l’étiquette à la mode qu’on accole à tous ceux qui critiquent la politique étrangère des pays occidentaux.

À lire la liste des directeurs de l’Atlantic Council pour lequel elle travaille, il est évident que cet organisme a tout intérêt à faire taire les discours critiques à l’égard des interventions militaires des États-Unis et de l’OTAN, et à les accuser de comploter avec l’ennemi du jour, Vladimir Poutine.

Ça se lit comme un véritable bottin mondain de l’élite néoconservatrice des États-Unis.

L’un des « directeurs à vie » de l’Atlantic Council est James Woolsey, ancien directeur de la CIA, lequel a récemment admis que les États-Unis s’ingèrent dans les élections d’autres pays, « mais toujours pour de bonnes causes ».

Le président par intérim est le général James L. Jones, ancien commandant du Commandement des États-Unis en Europe et des forces alliées en Europe, lequel a, dit-on dans sa biographie, donné à la mission illégale des États-Unis en Irak une « vision claire et un leadership constant ».

Le vice-président exécutif est Stephen Hadley, principal conseiller de George W. Bush sur la politique étrangère. Il a fondé la firme de conseils stratégiques RiceHadleyGates LLC avec nuls autres que Condoleeza Rice, secrétaire d’État sous George W. Bush, et Robert Gates, secrétaire à la Défense sous Bush et Obama, et directeur de la communauté du renseignement sous George Bush.

RiceHadleyGates LLC, écrit-on, “aide les cadres supérieurs des grandes entreprises à surmonter avec succès les défis commerciaux dans les marchés émergeants comme la Chine, l’Inde, le Brésil, la Turquie et le Moyen-Orient ».

Est-ce que l’invasion illégale d’un pays souverain basée sur des mensonges constitue l’une de leurs stratégies?

Parmi les administrateurs et membres honoraires du conseil d’administration, outre Robert Gates, Condoleeza Rice et Colin Powell, on trouve :

Frank Carlucci, secrétaire à la Défense sous Ronald Reagan et directeur adjoint de la CIA sous Jimmy Carter de 1978 à 1981. C’est sous son règne qu’est née l’opération Cyclone consistant à financer et armer des djihadistes en Afghanistan afin de renverser le gouvernement soutenu par l’Union soviétique;

Leon Panetta, secrétaire à la Défense et directeur de la CIA sous Obama;

Michael Morell, directeur adjoint et directeur intérimaire de la CIA sous Obama, qui a suggéré récemment de tuer des Iraniens et des Russes de manière clandestine. « Il ne faut pas le dire au monde entier. On ne se lève pas au Pentagone pour dire ‘’on a fait ça’’, mais on s’assure qu’ils le savent à Moscou et à Téhéran »:

David Petraeus, directeur de la CIA sous Obama;

Michael Chertoff, co-auteur du Patriot Act, secrétaire à la Sécurité intérieure des États-Unis sous George W. Bush;

Paula Dobriansky, co-auteure de la déclaration de principe du Projet pour un nouveau siècle américain, un cercle de réflexion néoconservateur réputé pour avoir recommandé dans Rebuilding America’s Defenses en septembre 2000, un an avant le 11-Septembre, que les États-Unis « s’engagent simultanément dans de multiples guerres de théâtre majeures », et la nécessité d’un nouveau Pearl Harbour afin de préserver la domination militaire du pays. Mission accomplie, comme disait George W. Bush;

Dov Zakheim, secrétaire adjoint à la Défense sous George Bush, co-auteur de Rebuilding America’s Defenses, ancien président de Booz Allen Hamilton, une firme qui aurait participé à la création d’un logiciel permettant à l’armée étasunienne de créer des faux comptes sur les réseaux sociaux afin de manipuler l’opinion publique et discréditer des gens. On la connait surtout grâce à son plus célèbre ex-employé, Edward Snowden.

Parmi les plus importants donateurs (et ici), on trouve les fabricants d’armes Lockheed Martin et Raytheon, le Rockefeller Brothers Fund et de nombreuses institutions financières, les Forces armées étasuniennes, l’OTAN, de nombreuses banques et pétrolières, dont Total, Chevron, BP et Exxon Mobil, ainsi que des gouvernements étrangers, dont les Émirats arabes unis.

La liste est beaucoup plus longue, mais vous voyez déjà un peu le topo : l’élite des services de renseignement, de la politique et des forces armées des États-Unis, financée par les fabricants d’armes, les pétrolières et la haute finance.

En nous présentant le DFRLab comme un organisme crédible « aidant le Canada et l’OTAN et d’autres pays de l’OTAN à lutter contre la désinformation » et en se fiant à eux pour traquer de fausses nouvelles pour leur reportage, sans nous dire qui dirige et finance cet organisme et sans présenter un point de vue critique de la part d’un autre intervenant, Radio-Canada se fait la porte-parole de la CIA et des criminels de guerre de l’élite néoconservatrice étasunienne.


Cet article est le 3e d’une série sur l’émission d’Enquête Ceci n’est pas un faux reportage.

Voici les deux premiers:

Petit recueil non exhaustif des fausses nouvelles à Radio-Canada

Faux comptes Twitter russes et manipulation de l’opinion publique : une idée de l’armée américaine

4 commentaires sur “Radio-Canada se fie à une organisation liée à la CIA pour traquer les fausses nouvelles

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